Permis de travail en Suisse (focus canton de Genève)
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Le marché du travail suisse est régi par une Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration (LEI) et ses ordonnances d’application (notamment l’OASA), ainsi que par l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) avec l’UE/AELE. Cet arsenal légal établit un système binaire : d’une part, les travailleurs en provenance de l’UE/AELE bénéficient d’un accès facilité (sans condition de qualification et sans contingents cantonaux) grâce à l’ALCP ; d’autre part, les ressortissants de pays tiers doivent remplir des critères stricts (niveau de qualification élevé, impératifs économiques) et sont soumis à des contingents limités d’autorisations (quota fixés annuellement par le Conseil fédéral dans l’OASA). Les principes généraux, tirés de la LEI et de ses directives, incluent notamment : la priorité donnée aux travailleurs suisses et UE/AELE (jusqu’à épuisement du marché national), l’obligation pour l’employeur de prouver l’absence de candidat local/ européen (offres d’emploi au guichet régional de l’emploi et sur EURES), ainsi que le respect des conditions salariales et de travail usuelles du secteur.
Modalités d’accès selon le profil : UE/AELE vs pays tiers
Citoyens UE/AELE : Bénéficient de la libre circulation. Ils n’ont pas besoin de contingents ni de preuve de recrutement local. Pour un emploi de moins de 3 mois (90 jours/an), aucune autorisation n’est requise ; on effectue seulement une procédure d’annonce en ligne auprès du SEM (c’est le cas aussi pour les prestataires détachés et indépendants UE jusqu’à 90 jours/an). Pour un emploi > 3 mois, il faut déposer une demande formelle de permis. La durée du contrat détermine le permis : jusqu’à 364 jours (1 an) on obtient généralement un permis L (séjour de courte durée), et pour un contrat d’1 an ou plus un permis B (séjour de longue durée, valant 5 ans renouvelable). Les titulaires de permis L ou B UE/AELE jouissent de la liberté géographique et professionnelle (accès au marché dans tout le pays).
Ressortissants de pays tiers (hors UE/AELE) : Ne peuvent être admis que s’ils sont hautement qualifiés (cadres, spécialistes, etc.). L’employeur doit en outre démontrer qu’aucun travailleur suisse ou européen n’est disponible pour le poste (annonces à l’Office régional de l’emploi et sur EURES, recherche infructueuse). Les salaires et conditions de travail proposés doivent être conformes à l’usage suisse. L’admission est soumise à quotas : le Conseil fédéral fixe chaque année un nombre maximal de permis B et L pour les « étrangers tiers » par canton (par ex. pour 2025 Genève dispose de 147 permis L et 91 permis B pour ces ressortissants). En cas de séjour prolongé, des critères d’intégration (connaissances linguistiques, âge) peuvent être pris en compte.
Démarches administratives générales
1. Initiative de l’employeur : La demande de permis de travail est déposée par l’employeur auprès de l’autorité cantonale compétente (l’Office cantonal de la population et des migrations – OCPM à Genève). En parallèle, le futur salarié originaire d’un pays soumis à visa doit effectuer une demande de visa auprès de la représentation suisse à l’étranger.
2. Instruction cantonale : Le canton vérifie la conformité du dossier au regard de la LEI (qualification du candidat, priorité du marché interne, conditions de travail, etc.) et, pour les ressortissants tiers, consulte la Direction de la main-d’œuvre étrangère (OCIRT) qui prépare un préavis (Commission tripartite cantonale).
3. Approbation fédérale : Si le canton émet un avis favorable, le dossier est transmis au Secrétariat d’État aux migrations (SEM) qui contrôle les critères nationaux. Le SEM rend une décision finale (positive ou négative) à l’employeur, au salarié et aux autorités cantonalessem.admin.ch. Un avis favorable n’est pas synonyme d’entrée immédiate en Suisse (sauf pour les détenants d’une « autorisation d’entrée avec prise d’emploi »).
4. Visa et entrée en Suisse : Après approbation du SEM, l’autorité cantonale transmet l’autorisation de visa (si nécessaire) à la représentation suisse dans le pays de résidence du travailleur, qui délivre alors le visa. Le salarié peut commencer à travailler dès qu’il est entré en Suisse et a déposé au plus tard dans les 14 jours une annonce de prise d’emploi auprès de l’autorité de son lieu de domicile.
5. Délais de traitement : À Genève, le traitement d’une première demande de permis de travail est en moyenne de 6 à 8 semaines tant pour les ressortissants UE/AELE que pour les tiers. Le permis frontalier (G) est quant à lui délivré en environ 3 mois (90 jours).
6. Documents requis : Les pièces usuelles à joindre sont le passeport en cours de validité, une photo d’identité, le contrat de travail, et pour le candidat sa formation (CV, diplômes, certificats), ainsi qu’une lettre de motivation de l’employeur détaillant le poste et le besoin de recruter à l’étranger. Il faut également fournir les preuves des démarches de recrutement effectuées en Suisse et en Europe (annonces, réponses, etc.), sauf en cas de transfert intra-groupe de cadres. Pour les besoins d’assurance impôt à la source et de logistique, l’employeur s’engage à respecter les exigences fiscales et à fournir, si nécessaire, une attestation de logement (contrat de bail).
Spécificités du canton de Genève
À Genève, l’Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) est chargé du traitement des demandes de permis de travail. La Direction de la main-d’œuvre étrangère (rattachée à l’Office cantonal de l’inspection et des relations du travail – OCIRT) élabore les préavis pour la Commission tripartite cantonale (employeurs, syndicats, État) qui statue sur l’intérêt économique de l’embauche. Ces instances veillent à l’application stricte des critères fédéraux : seuls les travailleurs qualifiés peuvent être engagés, la priorité aux candidats suisses/UE est respectée, et les conditions salariales locales sont garanties.
Genève publie chaque année les contingents alloués aux ressortissants tiers (et ex-UK). Par exemple, pour 2025 le Conseil fédéral a confirmé au canton de Genève 147 permis L et 91 permis B « travail » pour les étrangers non-UE. Ces chiffres illustrent les quotas dont dispose le canton : une fois le contingent épuisé, seules les demandes répondant aux exceptions très strictes peuvent encore être accordées.
Les démarches genevoises se font de plus en plus en ligne. Un compte « e-démarches » (type Simple) est requis pour déposer électroniquement les demandes de permis. Par exemple, l’annonce de prise d’emploi pour un permis frontalier G ou pour une annonce UE/AELE se fait via le portail EasyGov/SEM. Le permis frontalier se demande quant à lui par formulaire en ligne (avec paiement en ligne ou par facture), et est délivré en moyenne sous 12 semaines. En cas de problème technique, l’OCPM permet aussi de retirer le formulaire papier au guichet.
Types de permis de travail et conditions
Permis L : autorisation de courte durée (maximum 12 mois, renouvelable dans la limite de 24 mois au total). Il est accordé pour un contrat de travail de moins de 1 an. Les permis L sont soumis aux contingents (cas des étrangers tiers) et peuvent être limités à l’employeur ou à un projet particulier.
Permis B : autorisation de séjour de longue durée (généralement 5 ans, renouvelable). Il est délivré pour un contrat d’une année au moins ou à durée indéterminée. Les titulaires d’un permis B sont prioritaires sur le marché du travail suisse et bénéficient de la mobilité géographique dans tout le pays.
Permis C : autorisation d’établissement (séjour permanent sans activité réglementée) obtenue après plusieurs années de résidence. En général, 10 ans de séjour continu sont requis (demande « ordinaire »), sauf exceptions pour certaines nationalités ou profils. Par exemple, les ressortissants UE/AELE et certains pays (États ayant un accord d’établissement) peuvent prétendre au permis C après 5 ans. Genève rappelle qu’un permis C est accordé “d’office” sans démarche au bénéficiaire de certains statuts (professeurs d’université, conjoints de Suisse, etc.) après 5 ans.
Permis G (frontalier) : délivré aux ressortissants UE/AELE domiciliés dans un État limitrophe et employés par une entreprise suisse. Les conditions sont strictes : le frontalier doit retourner à son domicile à l’étranger au moins une fois par semaine, et l’autorisation est liée à un employeur précis (aucun droit de recherche d’emploi n’est accordé par ce permis). Le frontalier peut commencer à travailler dès l’envoi du dossier complet, et l’autorisation finale (envoyée à l’employeur) est en moyenne de 12 semaines. Les permis G ne sont pas soumis aux contingents genevois.
Pour les titulaires de permis N, F, S (demandeurs d’asile et personnes protégées), Genève précise que l’employeur doit déposer une demande spéciale ou, pour les réfugiés bénéficiant du permis F/B, simplement annoncer la prise d’emploi. Quant au regroupement familial, les proches de Suisses ou de titulaires de permis B/C disposent automatiquement du droit de travailler en Suisse sans autre autorisation.
Entreprises concernées et contexte professionnel
Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou secteur (PME, multinationales, start-ups, institutions internationales, etc.), peuvent embaucher des travailleurs étrangers – sous réserve de respecter le cadre légal décrit ci-dessus. Les obligations (preuve de recherche de main-d’œuvre, conditions salariales usuelles, quotas) s’appliquent uniformément. Cependant, certains cas particuliers méritent d’être notés : par exemple, les transferts intra-groupe internationaux ne nécessitent pas le même processus de preuve (l’entreprise motive moins sa recherche de candidats externes). De même, les entreprises innovantes ou les nouveaux projets high-tech peuvent parfois bénéficier d’un examen favorable du mandat de « promotion économique » – bien que la loi ne réserve pas de statut spécial, le profil très qualifié des postes facilite leur approbation.
Les travailleurs indépendants étrangers (freelances, entrepreneurs) suivent une procédure analogue. À Genève, un étranger qui s’installe comme indépendant doit aussi demander un permis de travail (B ou L) auprès de l’OCPM. Les ressortissants tiers doivent démontrer l’intérêt économique de leur activité en Suisse et sont soumis aux quotas ; seules les demandes solides (entreprise viable, qualifications élevées) sont autorisées. Les indépendants UE/AELE bénéficient eux de la libre circulation, mais doivent s’enregistrer dès que leur activité dépasse 3 mois/an.
En résumé, l’embauche d’un étranger en Suisse implique un processus strict encadré par la loi fédérale sur les étrangers (LEI) et ses ordonnances, avec quelques spécificités cantonales à Genève (OCPM, quotas, commissions tripartites). Les entreprises genevoises – qu’il s’agisse de PME locales, de filiales de grands groupes ou de start-ups innovantes – doivent planifier leurs recrutements étrangers en tenant compte de ces critères. Grâce aux portails en ligne (EasyGov et e-démarches cantonales) et aux informations officielles, les démarches sont devenues plus claires et accessibles, pourvu que les conditions légales soient bien remplies.
Sources : Texte de loi et sites officiels suisses (SEFRI, SEM, admin.ch, ge.ch)
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